Conte de Noël ou compte de Noël ?
L’air du temps se saturant, de plus en plus, de l’atmosphère de Noël, je me suis dit que le mieux serait de mettre mon humeur au même diapason. Ça tombe bien puisque Père Noël ayant décidé de plus démissionner, cela me donne la chance de pouvoir lui écrire ma lettre. Certaines et certains d’entre vous vont, probablement, trouver que cela n’est plus tout à fait de mon âge. Dommage car, à mon point de vue, il me semble qu’il n’y a pas d’âge pour se lancer dans cet exercice. Nous sommes tous porteurs de notre enfance, à divers degrés. Pourquoi ne pas l’accepter ?
Monsieur, tout de même, vous savez bien que le Père Noël n’existe pas ! Ah oui ? Dans ce cas, expliquez-moi donc, alors, pourquoi vous faites tant de cas de cette fête ? Pourquoi autant d’exploitation d’un personnage qui n’existe pas ? Comment expliquez-vous que vous mettiez autant d’énergie à faire tant de tralala autour de son nom ? Laissez-moi vous dire, à ce propos, que ces pseudos Père Noël que je croise dans les centres commerciaux ou sur les rues marchandes, avec leurs fausses barbes plastifiés et leur Ho ! Ho ! Ho ! sonnant faux, sont, généralement, assez pathétiques.
Et la magie de Noël, celle qui émerveille les enfants, qu’en faites-vous alors monsieur ? J’attendais votre question pour mieux vous la retourner. Cette magie que vous leur attribuez, n’est-ce pas, dans le fond, un peu de celle dont vous aimeriez pouvoir encore vous étonner ? Seulement voilà, il y a un doute. La magie, c’est comme le Père Noël, ça n’existe pas. Dommage pour vous. La magie ça existe et on devrait même la considérer comme essentielle au bien-être global de tout être humain. Hélas, on ne peut pas l’acheter dans un centre commercial !
On a dénaturé la magie, particulièrement celle de Noël. Ce n’est plus la chasse aux lutins qui mobilise nos énergies pour construire avec nos enfants ces fabuleux pièges dont ma fille aînée possède le secret de fabrication. Cette année, Zoè et Elwan, mes petits-enfants, ont réussi à en prendre chacun un. Imaginez leurs regards heureux, lorsque sortant dans la cour, chaudement habillés, ils ont trouvé leur lutin au fond de la boîte en carton ! Cette chasse aux lutins est bien plus riche de magie que la chasse aux aubaines de ce non-sens qu’est le boxing-day. Indécente journée, dans mon échelle de valeur, qui porte bien son nom. Il suffit de voir comment certains se bousculent comme sur un ring de lutte !
Si le vrai Père Noël n’existe pas, qu’est-ce qui nous empêche de penser que nous pouvons toujours être le Père Noël de quelqu’un ? Et si nous retrouvions, simplement, cette capacité de faire de ce moment du solstice d’hiver, une pause vraie au milieu de la folie ambiante ? Et si nous acceptions, pour quelques heures, de nous déconnecter de tous ces gadgets semeurs d’illusions et de virtualité pour nous connecter avec les êtres : nos enfants, nos compagnes et compagnons de vie, ceux et celles que l’on aime ou que l’on côtoie ? Chacun serait alors un vrai Père Noël !
Il ne suffit pas de faire jouer de belles chansons de Noël, de garnir nos maisons de décorations et de lumières ni même d’installer des Père Noël, des traîneaux et des rennes gonflables pour recréer la magie. Il faut d’abord la porter en soi et savoir la partager dans ce qu’elle porte de plus fabuleux : savoir prendre le temps d’être. Voilà, je crois, le plus beau cadeau de Noël à offrir et à s’offrir.